Que peuvent bien avoir en commun des groupes comme Burning Heads, Asian Dub Foundation et Radiohead ? Ils ont tous participé au Festival de musique de Balélec à Lausanne, en Suisse. L’idée de cette manifestation remonte à 1981, lorsque des professeurs de la Faculté de génie électrique et électronique (STI) de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) – l’université technique la plus cosmopolite d’Europe – ont pensé qu’un peu de détente sur place ne ferait pas de mal à leurs étudiants.
Cette manifestation est bien vite sortie du cadre de la STI, en séduisant l’ensemble du campus. Elle connaît depuis un succès grandissant et a même franchi le cap des 15 000 visiteurs. Chaque année, le temps d’une nuit, la prestigieuse institution se transforme complètement en accueillant sur son campus de nombreuses scènes et clubs où se tiennent plus de 30 concerts.
L’événement lui-même s’appuie sur une organisation bien rodée, avec ses alignements de stands de restauration et de bars à l’infini, ses installations sanitaires et de tri des déchets, son service complet de navettes – sans oublier son dispositif de sécurité de premier ordre. Il devenait donc impératif de gérer l’impact environnemental de cette soirée. Et pour que la manifestation soit encore plus verte, Balélec a donc décidé de se faire certifier selon la norme ISO 20121 sur les systèmes de management responsable appliqués à l’activité événementielle, qui aide les organisateurs à identifier – et atténuer – les nuisances de ce festival sur le plan social, économique et environnemental.
En adhérant aux principes de la norme, le festival s’est attaché à rationaliser la gestion de ses déchets et à limiter sa pollution sonore, tout en favorisant le dialogue avec ses partenaires et la coordination dans l’ensemble du campus. Une métamorphose assez spectaculaire s’est opérée, avec le recyclage des gobelets et de la vaisselle, la mise à disposition de cendriers de poche et le remboursement des frais de transport public… Le Festival de musique de Balélec, qui a obtenu la certification à temps pour son édition 2014, nous montre ainsi que la fête peut aussi être plus verte, comme l’explique Miriel Steudler, Responsable Qualité de la manifestation.
Pour quelles raisons le comité organisateur du Festival Balélec a-t-il choisi d’employer ISO 20121 ?
En 2007, le Festival Balélec a été le premier festival suisse à implémenter la norme ISO 14001 pour mieux gérer son impact environnemental. L’esprit novateur soufflant au sein du comité d’organisation et notre quête d’amélioration continue nous ont incité à nous tourner vers la norme ISO 20121 dédiée à l’activité événementielle ; celle-ci a été l’occasion d’étendre notre système de management aux aspects sociaux et économiques.
Du reste, ces considérations socio-économiques ont exigé une attention particulière ces dernières années, afin de garantir la pérennité de la manifestation. En effet, d’une édition à l’autre, celle-ci doit s’adapter au site de l’EPFL, en constante mutation, à la proximité des voisins et à des partenaires soucieux de leur politique de sponsoring. Enfin, la certification obtenue dans le cadre de cette démarche permet de faire reconnaître officiellement le professionnalisme du comité, essentiellement composé d’étudiants bénévoles.
Vous comptez rééditer l’expérience pour l’édition 2015 du festival. Quelles leçons avez-vous tirées de l’année précédente ? Que ferez-vous différemment à l’avenir ?
Nous avons pu observer que l’amélioration de notre communication interne et de la coordination entre nos différents pôles permettait d’éviter bien des malentendus ou erreurs susceptibles de se refléter négativement à l’extérieur : impacts financiers sur notre réputation ou pertes de temps, par exemple. Nous comptons donc persévérer dans cette voie.
Par ailleurs, après notre débriefing annuel et un recueil des plaintes en externe, nous avons été à même d’identifier certains points à corriger. Nous espérons les formaliser et en mesurer les progrès pour éviter que les erreurs du passé ne se reproduisent cette année. Nous poursuivons notre travail en matière de gestion des déchets, d’augmentation de l’offre en termes de sanitaires, ainsi que pour une meilleure coordination avec l’EPFL et une plus grande sensibilisation de nos partenaires à notre démarche.
Avec plus de 120 partenaires participant au festival, quel a été, pour vous, le plus grand défi ?
Le Festival Balélec se distingue depuis 34 ans par son site singulier. Implanté sur un campus universitaire, les festivaliers et les étudiants déambulent dans les couloirs, salles de cours et allées extérieures de l’EPFL. Le temps d’une soirée mémorable, ils peuvent découvrir l’École sous un nouveau jour.
La taille de la manifestation et son organisation, huilée mais complexe, impliquent un dialogue et une coordination considérables entre notre comité et nos 120 partenaires tout en satisfaisant aux contraintes de l’EPFL. Nous faisons souvent face à une double contrainte : les besoins et les attentes de l’EPFL d’un côté et ceux du reste de nos partenaires de l’autre. Enfin, la renommée grandissante de la manifestation impose d’autres contraintes, à pondérer avec celles liées au site, en constante évolution, qui nous oblige à nous adapter d’année en année.
Parlez-nous des questions logistiques auxquelles vous devez faire face (nombre d’employés, considérations budgétaires, temps consacré à l’implémentation d’ISO 20121) ?
Le Festival Balélec se déroule sur un soir. Il a accueilli ces dernières années 15 000 personnes par édition, moyennant un budget de quelque 650 000 francs suisses, ce qui en fait un des plus importants festivals de Suisse romande. Le comité se compose de 50 membres, dont une quinzaine de nouveaux entrants chaque année. En outre, 350 bénévoles nous rejoignent pour la durée de l’événement.
Nous avons décidé d’implémenter la norme ISO 20121 en septembre 2013 et avons été certifiés le 4 avril 2014. Trois membres du comité, dont moi-même, ont œuvré à ce projet. Deux d’entre nous avaient déjà travaillé avec la norme ISO 14001 ; nous avons donc pu utiliser les bases du système existant et l’étendre avec plus d’aisance. Le budget dévolu au système est celui de la certification ; de manière plus globale, nous attribuons plus de 10 % de notre budget à des actions liées au développement durable (transports, sanitaires, vaisselles et gobelets consignés, déchets…).
Quels ont été les principaux résultats et impacts ?
Le comité d’organisation change d’année en année. Or la norme nous oblige à formaliser certaines procédures de sorte que le changement de comité se fait avec plus de facilité et permet à chacun de trouver les bonnes informations rapidement et d’atteindre les objectifs. La structure en PDCA, Plan-Do-Check-Act (Préparer, Développer, Contrôler, Agir), nous permet en outre de faire vivre le lien d’édition en édition et de poursuivre nos progrès.
Les principaux impacts environnementaux sur lesquels nous travaillons sont les déchets, les sanitaires et le bruit. En matière d’impact social, nous travaillons avec le voisinage et l’EPFL pour une meilleure communication et collaboration. Pour ce qui est de l’aspect économique, en revanche, assurer la satisfaction de nos sponsors et une juste rémunération de nos partenaires reste une de nos priorités.
Quels conseils donneriez-vous aux utilisateurs d’ISO 20121 ?
Pour tirer pleinement profit d’un système de management ISO 20121, il est essentiel de fédérer toute l’équipe organisatrice du festival autour du processus mis en place. L’implication et la motivation du comité sont indispensables au bon déploiement de la norme et à la réalisation de ses objectifs.
Le développement durable est un sujet d’actualité mais la force de la norme est avant tout de s’adapter aux besoins, à la taille et à la vision de chaque manifestation. Nous sommes fiers d’être parvenus à nos fins et sommes désormais confiants en notre capacité à exploiter aux mieux les atouts d’ISO 20121. Nous invitons les professionnels du domaine à nous suivre dans cette voie !